Depuis fin août en librairies, véritable phénomène français !
La rentrée littéraire 2018 c'est :
> 567 Romans dont 381 romans français
> 186 romans étrangers
> et 94 premiers romans
Des écrivains hommes ou femmes, des primo-romanciers (on a découvert Adeline Dieudonné avec son livre "la Vraie vie", ou "Ça raconte Sarah" de Pauline Delaroy-Allard), des habitués ....français mais aussi italiens, islandais (John Kalman Stefanssson avec "Asta"), espagnols (Javier Cercas avec "le Monarque des ombres"), des anglais (Emma Glass avec "Pêche"), japonais ("le Meurtre du commandeur" de Haruki Murakami), américains ("Manhattan Beach" de Jennifer Egan), portugais, suédois ....
Les incontournables français : Christine Angot avec "Un tournant de la vie", Alain Mabanckou, Jérôme Ferrari, Amélie Nothomb avec « Les prénoms épicènes », Yasmina Khadra avec « Khalil », Serge Joncour « Chien-loup » ....
D'autres étrangers dont on ne va pas pouvoir se passer : Julian Barnes, Salman Rushdie, Nancy Huston, Don Chaon...
Leurs récits sont souvent bien ancrés dans notre époque (Salman Rushdie avec "la Maison Golden", Alla el-Asnany "J'ai couru vers le Nil" ), ils peuvent nous parler de la petite histoire, de l'intime ("Tous les hommes désirent naturellement savoir" de Nina Bouraoui, "Dix-sept ans" de Eric Fottorino), comme de la Grande Histoire ("La révolte" de Clara Dupont-Monod, "Frère d'âme" de David Diopp ou "Kanaky" de Joseph Andras), mettre à jour une ville (Istanbul dans "le Sillon" de Valérie Manteau) une personne (Vanessa Schneider racontant la vie de sa tante dans "Tu t'appelais Maria Schneider"), une actualité , nous parler aussi de la place de l'art dans notre société ("A son image" de Jérôme Ferrari ou "un monde à portée de main" de Maylis de Kerangal) ...
La rentrée littéraire c'est aussi celle des éditeurs de renom, ou d'autres qui font leur place (Gallmeister, Le Cherche-midi, L'Iconoclaste...)
Comment donc ne pas se noyer dans cette marée de la rentrée littéraire ?
Faire sortir du lot quelques ouvrages ?
Après de nombreuses lectures, voici mon palmarès :
- A son image de Jérôme Ferrari . Actes sud
Le livre démarre par les obsèques d'une jeune photographe, Antonia, célébrées par un prêtre qui n'est autre que son oncle qui lui avait offert son premier appareil photo. Antonia qui, enfant se passionnait pour les photos de famille et va devenir photoreporter.
Véritable réflexion sur la photo, sur les rapports entre la photo et l'histoire. C'est aussi un roman politique, de l'histoire du nationalisme en Corse à la guerre en ex-Yougoslavie. Un livre sur les liens entre la photo et le réel, sur le métier de photoreporter qui nous montre la violence de notre société.
- Un monde à portée de main de Maylis de Kerangal chez Verticales
L'histoire de Paula qui se rêve peintre et intègre une école d'art à Bruxelles où elle va, sans cesse, essayer de « copier » la nature, ses marbres, ses écorces.
De Paris à Bruxelles, en passant par l'Italie et jusqu'aux grottes de Lascaux, Maylis de Kerangal, dans ce roman d'apprentissage, s'interroge sur la place de l'art par rapport à la réalité ; est-ce qu'être copiste c'est être artiste ? Quelle est la place de l'art dans la « simple » copie de réel ?
C'est avec la rigueur d'un documentaire, une richesse du vocabulaire que l'auteure nous fait entrer dans le savoir-faire de cet art du trompe-l'œil.
- Arcadie de Emmanuelle Bayamack-Tam chez Gallimard
Où l'on suit Farah, 16 ans, qui vit, à cause de l'hypersensibilité aux ondes de sa mère, à Liberty house, un manoir où Arcady, le gourou et son compagnon Victor ont créé une communauté accueillant tous les laissés-pour-compte de la société de consommation.
Farah est laide et s'aperçoit, à la puberté, qu'elle a des attributs féminins autant que masculins, elle est en quête de sa propre identité, sexuelle, mais pas seulement ...
Dans ce phalanstère où se retrouvent, loin de toute réalité, sans ordinateurs ni téléphones, toute une colonie de «freaks », arrive un jeune réfugié Erythréen...
L'auteure, que j'avais déjà beaucoup aimée lorsqu'elle avait écrit « Les Garçons de l'été » sous le pseudonyme de Rebecca Lighieri, nous fait enter ici dans un univers désarmant, improbable, souvent dérangeant, servi par une écriture à la fois très poétique et très crue, un roman politique aussi... et des personnages qui nous suivront longtemps.
- Swing time de Zadie Smith
Un roman d'apprentissage enjoué et ironique qui raconte l'amitié de deux petites filles métisses, toutes deux passionnées de danse, dans les années 1980 dans un quartier populaire de Londres.
Leurs parcours respectifs les éloignent : tandis que l'une devient assistante d'une star de la chanson, l'autre a du mal dans le monde de la danse...c'est l'histoire d'une amitié tout au long d'une vie, de deux destins, de recherche d'identité sur fond de racisme ordinaire.
Pas sans rappeler « L'amie prodigieuse » de Elena Ferrante, plongez-vous dans ce roman plein d'énergie !
- Le Train d'Erlingen de Boualem Sansal chez Gallimard
La baronne Ute Von Ebert écrit à sa fille qui vit à Londres en sachant parfaitement que ces lettres ne lui parviendront pas, la poste ne fonctionnant plus. La ville est en état de siège et ses habitants attendent un train qui permettrait de l'évacuer.
Le rythme soutenu de cette dysptopie sous fond de « désagrégation planétaire » en fait un roman géopolitique efficace et courageux qui fait face à toutes les peurs contemporaines.
- Le Guetteur de Christophe Boltanski chez Stock
A la mort de sa mère, l'auteur retrouve un manuscrit d'un roman policier inachevé portant le titre « Le guetteur ».
Commence alors une enquête sur sa mère où il cherche comme un « guetteur », un voyeur, à comprendre comment la jeune femme étudiante à la Sorbonne, dans les années 50, très engagée politiquement aux côtés du FLN, a pu devenir cette vieille femme acariâtre et paranoïaque d'avant sa mort.
Après avoir parlé de ses origines dans son précédent livre « La cache », Christophe Boltanski nous offre un roman bouleversant d'un fils à la recherche de sa mère.
- L'Abattoir de verre de J.M. Coetzee aux éditions du Seuil
Dans ce recueil de sept histoires, J.M. Coetzee retrouve son « double littéraire », Elizabeth Costello. C'est de la vieillesse de cette femme écrivain dont il nous parle, avec pudeur et sans un mot de trop, de sa solitude, de ses inquiétudes face à ses pertes de mémoire, de l'empressement de ses enfants.
Prix Nobel de littérature en 2003, Coetzee n'a rien perdu de son style épuré et élégant qui nous touche tant.
- Le Bruit du dégel de John Burnside aux éditions Métailié
Kate, étudiante en cinéma, est à la dérive, entre le deuil de son père et ses amours bancals, elle se réfugie dans l'alcool. En faisant des enquêtes de voisinage pour le compte de son petit-ami, elle rencontre Jean, une vieille femme qui vit dans une petite maison accueillante entourée d'un jardin.
Celle-ci s'aperçoit très vite de l'addiction de Kate et accepte de lui raconter sa vie seulement si Kate arrête de boire.
Commence alors une relation toute en douceur, entre thé chaud et petits gâteaux.
Une amitié se noue entre ces deux femmes dont l'une raconte l'histoire récente des Etats-Unis à travers sa propre histoire et l'autre a juste le talent de l'écouter.
Un livre bienveillant, à l'ambiance feutrée, à lire au coin du feu, entre un thé et une pâtisserie, en écoutant « le bruit du dégel ».
- Les Cigognes sont immortelles d' Alain Mabanckou aux éditions du Seuil
Toujours à Pointe-Noire, après nous avoir narré son enfance et son adolescence, dans « Lumière à Pointe-Noire », Alain Mabanckou met en scène Michel, un collégien qui vit avec Maman Pauline et Papa Roger, ses petits soucis et son quotidien qui va bientôt être bouleversé par l'assassinat en 1977 du président du Congo.
Entre l'intime de cet adolescent et de sa famille, raconté avec humour et poésie et la Grande Histoire du Congo, c'est toute l'histoire politique du continent africain, entre colonialisme et indépendance que nous fait parcourir l'auteur.
Grâce au ton spontané du garçon et à la verve de conteur de l'auteur, on est vraiment avec Michel, au pied du manguier, l'arbre à palabres sous lequel Papa Roger écoute la radio...
- Helena de Jeremy Fel chez Rivages
Dans le Kansas, alors qu'elle part préparer un tournoi de golf, en hommage à sa mère disparue, Hayley tombe en panne et est secourue par Norma, mère de famille qui vit seule dans une maison isolée avec sa fille Cindy et ses deux adolescents Tommy et Graham.
Tout aurait pu aller pour le mieux si Tommy n'avait pas commis l'irréparable et le roman s'enfonce alors dans ce qu'il y a de plus noir.
Un thriller psychologique autour de la vengeance et qui pose la question : jusqu'où une mère peut-elle aller pour protéger ses enfants ?
Après « Les Loups à leur porte », Jérémy Fel poursuit son exploration du Mal.
Et un petit supplément : un livre drôle, ce qui est rare en ces temps obscurs : « Invasion » de Luke Rhinehart, satire assez grossière de la société contemporaine américaine où des extra-terrestres envahissent le monde avec pour seul objectif : rigoler !
J'espère que cette petite sélection vous permettra de découvrir des auteurs, de passer de bons moments mais comme «tout choix est renoncement », je vous invite à compléter cette liste en m'envoyant vos coups de cœur de cette rentrée, et nous les mettrons avec plaisir sur notre portail : plus on est de lecteurs, plus on lit !
Merci !
Valérie